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CRISE FINANCIÈRE, MON CUL ! "Intermède"

Novembre 2008

, par l’incongru


Et voilà donc le retour des vieux démons et leur cohorte d’horreurs en prévision…

Si le système capitaliste d’avant la crise de 1929 s’appuyait sur des valeurs plus réalistes, telles que les moyens de production, leurs entreprises ou l’étalon or, celui qui en découla ne tira guère de leçons de cette crise qui plongea le monde dans la guerre. Le nouveau capitalisme s’est contenté de brasser des milliards de dollars en monnaie virtuelle reposant sur l’endettement de quelques états réputés fiables. Un seul chiffre permet de comprendre ce qui se passerait si les États-Uniens décidaient comme l’on fait les Russes en 1918 de répudier leur dette : Celle des USA représente à ce jour 10 000 milliards de dollars.

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Visionner la dette

En conséquence, et il n’est point besoin d’être prédicateur pour pressentir ce qui va se passer dans les mois et les années qui vont suivre. Dans les arcanes du pouvoir, on se prépare déjà à voir jaillir ici ou là quelques manifestations de violence dues à la récession qui se profile à l’horizon. En attendant, les dirigeants des pays occidentaux ont ordonné le black-out sur la situation financière internationale et redoublent d’optimisme à coups de milliards puisés dans des caisses déjà vides. A ce propos, les pays du golfe persique ont proposé des prêts énormes au FMI et aux pays touchés par la crise en échange de la technologie nucléaire. Drôle, non ?

La note va être salée… Car le mensonge a un coût et la rhétorique ses limites.

A force de se répandre en contorsions pour alimenter de vertus roboratives les statistiques et les résultats économiques accablants, la dyarchie politico-financière va sans nul doute finir par éveiller les soupçons du manant qui, devant ses bourses exsangues, ne va pas tarder à s’apercevoir que trimer jusqu’à 70 ans ne lui servira à rien. Nous allons assister impuissants à la fermeture des entreprises, à l’inflation galopante et la volubilité menaçante des discours politiques n’y changera plus rien.

Pessimiste, le discours de l’incongru ? Non juste un intermède avant l’éclaircie du 3ème acte.

Alors, pendant cet intermède les vieux démons vont resurgir, puisqu’il va bien falloir trouver des coupables à cette situation. S’ensuivront des grèves et des manifestations lourdement réprimées, car insupportables pour un pouvoir moribond qui feint l’hyperactivité permanente. Puis, comme toute civilisation en déshérence, quelques leaders charismatiques soulèveront les peuples les uns contre les autres pour une ultime répétition de la Der des Ders. La manœuvre ne sera pas bien compliquée, car nous vivons déjà dans un état permanent d’alerte et de peur au gré des plans « rouge » « Vigipirate » et autre alerte orange quotidienne.

En attendant l’avènement de ces démiurges, quelques souffrances inaudibles vont sourdre aux oreilles attentives

L’Afrique et son cortège effroyable de barbarie et de massacres s’alarme déjà de ce que vont devenir les aides humanitaires qui lui permettait de garder la tête hors de l’eau. Le Congo brisé par plusieurs guerres fratricides se voit déjà refuser l’aide internationale en force d’interposition dite « Casques Bleus » Comment 4 millions de morts en sept ans de guerre ne suffisent-ils pas à justifier une intervention décisive dans la région ? Et si ce n’étaient que des morts au combat, mais plus de 90% des morts sont le résultat de massacres, de malnutrition ou de maladies comme le choléra qui se répandent dans les camps de réfugiés. La quasi totalité des victimes sont des civils, villageois, paysans sans défense que les armées torturent ou mutilent avant de les laisser agoniser au soleil. Mais à quoi bon le dire, l’exégèse historique nous amène inéluctablement à constater que la permanente folie de quelques hommes, tapie sous une lie de sang et de sperme, phagocyte le flux incessant des progrès dédiés à la connaissance et au bonheur de l’humanité. Comment sinon expliquer les exactions commises par toutes les armées du monde quel que soit leur degré de civilisation ? Comment un militaire, qui avant de le devenir, était peut-être un père ou un amant, peut-il se résoudre à violer, puis disséquer des femmes et des enfants reclus dans des villages ? Le Congo aujourd’hui nous frappe par sa barbarie présente, mais c’est faire peu de cas de notre glorieux passé et de celui de nos voisins occidentaux paraissant si civilisés aujourd’hui.

Les récits sur la barbarie des Hommes sont intarissables et si nous n’avons rien à envier à nos prédécesseurs en matière d’imagination, nous avons redoublé d’efforts dans le domaine de l’extermination de masse. Certains de ces innombrables témoignages vous donnent froid dans le dos, c’était il y quelques années seulement, nous vivions encore dans ces océans de misère persuadés d’avoir raison :

« Puis les haut-parleurs diffusèrent une bruyante musique classique tandis que les SS le mettaient à nu. Puis ils lui enfoncèrent violemment sur la tête un seau en fer blanc. Ils lâchèrent sur lui les féroces chiens de garde du camp, des bergers allemands qui le mordirent d’abord au bas-ventre et aux cuisses avant de le dévorer sous nos yeux. Ses hurlements de douleur étaient amplifiés et distordus par le seau sous lequel sa tête demeurait prise. Raide et chancelant, les yeux écarquillés par tant d’horreur, des larmes coulant sur mes joues, je priai ardemment pour qu’il perde très vite connaissance »

« Depuis, il m’arrive encore souvent de me réveiller la nuit en hurlant. Depuis plus de cinquante ans, cette scène repasse inlassablement devant mes yeux. Je n’oublierai jamais cet assassinat barbare de mon amour. Sous mes yeux, sous nos yeux. Car nous fûmes des centaines à être témoins. Pourquoi donc se taisent-ils encore aujourd’hui ? Sont-ils donc tous morts ? Il est vrai que nous étions parmi les plus jeunes du camp, et que beaucoup de temps a passé. Mais je pense que certains préfèrent se taire pour toujours, redoutant de réveiller d’atroces souvenirs, comme celui-ci parmi d’autres »

"J’avais dix-huit ans, et je n’avais plus d’âge."

Pierre Seel "Pour un plaisir mille douleurs" La citation de Villon qui ouvre le récit de Pierre Seel (éditions Calmann-Lévy de Mars 2001) résume la trajectoire de cet homme marqué à jamais par la cruauté nazie.

Nos psychothérapeutes expliquent parfois ces anomalies du comportement humain en société par le SSPT (Syndrome du Stress Post Traumatique) Des violences observées ou subies par le passé seraient à l’origine de conduites identifiables à des phénomènes de vengeance. Toujours est-il, que ce soient les effets de la testostérone ou de l’absorption de psychotropes telle que la cocaïne, les ravages commis par les armées sur les populations civiles sont le lot de toutes les guerres modernes. Seule l’éthologie nous offre quelques éléments de réponse.

Hiérarchie chez les rats

« Une expérience a été effectuée sur des rats. Pour étudier leur aptitude à nager, un chercheur du laboratoire de biologie comportementale de la faculté de Nancy, Didier Desor, en a réuni six dans une cage dont l’unique issue débouchait sur une piscine qu’il leur fallait traverser pour atteindre une mangeoire distribuant les aliments. On a rapidement constaté que les six rats n’allaient pas chercher leur nourriture en nageant de concert. Des rôles sont apparus qu’ils s’étaient ainsi répartis : deux nageurs exploités, deux non nageurs exploiteurs, un nageur autonome et un non nageur souffre-douleur.

Les deux exploités allaient chercher la nourriture en nageant sous l’eau. Lorsqu’ils revenaient à la cage, les deux exploiteurs les frappaient et leur enfonçaient la tête sous l’eau jusqu’à ce qu’ils lâchent leur magot. Ce n’est qu’après avoir nourri les deux exploiteurs que les deux exploités soumis pouvaient se permettre de consommer leur propre croquette. Les exploiteurs ne nageaient jamais, ils se contentaient de rosser les nageurs pour être nourris.

L’autonome était un nageur assez robuste pour ramener sa nourriture et passer les exploiteurs pour se nourrir de son propre labeur. Le souffre-douleur, enfin, était incapable de nager et incapable d’effrayer les exploités, alors il ramassait les miettes tombées lors des combats. La même structure (deux exploités, deux exploiteurs, un autonome et un souffre-douleur) se retrouva dans les vingt cages où l’expérience fut reconduite.

Pour mieux comprendre ce mécanisme de hiérarchie, Didier Desor plaça six exploiteurs ensemble. Ils se battirent toute la nuit. Au matin, ils avaient recréée les mêmes rôles. Deux exploiteurs, deux exploités, un souffre douleur, un autonome. Et on a obtenu encore le même résultat en réunissant six exploités dans une même cage, six autonomes, ou six souffre douleur.

Puis l’expérience a été reproduite avec une cage plus grande contenant deux cents individus. Ils se sont battus toute la nuit, le lendemain il y avait trois rats crucifiés dont les autres avaient arraché la peau. Moralité : plus la société est nombreuse plus la cruauté envers les souffre douleur augmente. Parallèlement, les exploiteurs de la cage des deux cents entretenaient une hiérarchie de lieutenants afin de répercuter leur autorité sans même qu’ils aient besoin de se donner le mal de terroriser les exploités.

Autre prolongation de cette recherche, les savants de Nancy ont ouvert par la suite les crânes et analysés les cerveaux. Or les plus stressés n’étaient ni les souffre-douleur, ni les exploités, mais les exploiteurs. Ils devaient affreusement craindre de perdre leur statut privilégié et d’être obligés d’aller un jour au travail.

Se pourrait-il que pour chaque espèce animale il existe une sorte de grille d’organisation spécifique. Quels que soient les individus choisis, dès qu’ils sont plus de deux, ils s’empressent de tenter de reproduire cette grille pour s’y intégrer. Peut-être que l’espèce humaine est tributaire elle aussi d’une telle grille. Et quel que soit le gouvernement anarchiste, despotique, monarchiste, républicain ou démocratique, nous retombions dans une répartition similaire des hiérarchies. Seules changent l’appellation et le mode de désignation des exploiteurs »

Pendant cet intermède si généreusement accordé par la crise financière, nous aurons donc l’occasion de voir si les vieux démons qui nous habitent sont définitivement maîtrisés ou si nous sommes toujours en proie à la fugacité de nos grandes résolutions. A défaut de voir ce dilemme qui nous tenaille devenir notre épitaphe, l’incongru propose, pendant la pause, de réfléchir un instant sur la nécessité d’un hédonisme épicurien, seul remède à priori à nos turpitudes à venir.

Le moment le plus redoutable que nous refusons d’admettre, est que cette idiosyncrasie qui caractérise une partie des êtres humains dans cette propension à semer la haine et la terreur nous est commune. Pour résumer, nous sommes tous des bourreaux en état de veille.

Ne sais-tu pas que dans chacune de tes actions, l’histoire entière du devenir se répète en abrégé ? [Friedrich Nietzsche]

A suivre


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